La nature au coeur des villes
Par Sophie Bégot
publié le 10 juillet I photos P. Lamy
L’embellissement des villes et le fleurissement peuvent sublimer un territoire, lui donner une véritable identité et permettre aux habitants de s’y sentir bien. Patrick Lamy nous éclaire sur l’importance de mettre cette idée de cadre de vie au cœur des réflexions sur la qualité de vie.

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Personnellement, tous ces aspects de fleurissement, d’aménagement des villes, de « renaturation » de notre quotidien m’intéressent et m’interpellent quand je traverse les communes ou que je pose le regard sur les espaces de Grand-Champ que j’habite. Me viennent à l’esprit les nombreux jardins partagés de Landerneau sur les bords de l’Elorn, le jardin « cocooning » de Lauzach niché au cœur de bourg et dans lequel se retrouvent toutes les générations, ou encore au parc de Vitré qui abrite d’impressionnants séquoia plusieurs fois centenaires.
Pour en savoir plus sur le sujet, je décide de rencontrer un professionnel du secteur. J’ai choisi d’interroger Patrick Lamy, horticulteur pépiniériste breton depuis plus de 30 ans, dans l’entreprise familiale créée en 1948 par son père. Les tendances d’aménagement du cadre de vie des communes, il les suit, les analyse et même les évalue dans le cadre du label « villes et villages fleuris ». Il porte un regard critique et constructif sur ce qu’il observe partout en Bretagne… et même à Grand-Champ.
Sophie Bégot : Bonjour Patrick ! On voulait te rencontrer pour que tu nous fasses découvrir ce que le végétal peut apporter dans un cadre de vie communal et dans le respect de l’espace de vie.
Patrick Lamy : Bonjour Sophie ! Avec plaisir pour répondre à toutes tes questions. Aujourd’hui, les végétaux et les aménagements urbains peuvent apporter de vraies solutions aux attentes et aux besoins des habitants d’une commune. Par exemple, ils peuvent être des puits de fraîcheur pendant les périodes chaudes. Ils permettent aussi de réfléchir à l’aménagement de cheminements doux pour protéger les usagers les plus fragiles. Parallèlement, ils entrent dans une réflexion plus vaste, signe d’un engagement plus écoresponsable (entretiens alternatifs et zéro phyto, effacement des réseaux, réflexion de collecte et de gestion de l’eau…). Cependant, de mon point de vue, il me semble que, quand une commune engage cette réflexion, c’est également l’opportunité pour elle de réfléchir en parallèle et en complémentarité à des projets d’accès PMR pour les personnes en situation de handicap, dans des actions intergénérationnelles et pédagogiques ou encore de « revégétalisation » pour l’atténuation du changement climatique.
SB : Les habitants des communes sont souvent très sensibles à l’ambiance végétale de leur espace de vie. Toi qui évalues la qualité des espaces végétalisés des communes et des villes, saurais-tu me dire ce qui plaît le plus aujourd’hui aux habitants ? Qu’est-ce qui répond véritablement à leurs aspirations ?
PL : C’est difficile à dire : tout comme la mode, l’aménagement végétal des communes suit aussi des tendances, des nouveaux principes inspirés d’ailleurs, des créations plus ou moins exotiques. Quand il faut répondre à des injonctions de simplicité, d’économie d’intervention, de durabilité ou encore de modernité… on en arrive souvent à ne choisir que des vivaces, à préférer des arbustes faciles d’entretien, à minéraliser les parterres… et à standardiser toutes les villes de la même manière.
SB : Alors, selon toi, on fait comment pour garder l’identité des communes à travers les choix d’aménagement ? Pour en faire une solution aux enjeux de bien-être et de bien-vivre des habitants ?
PL: Il faut se réinventer, s’appuyer sur les habitants et ne pas hésiter à les interroger pour définir avec eux les thèmes, les éléments végétaux identitaires de leur commune. Chacun peut ensuite s’en inspirer et, pourquoi pas, les reproduire dans son jardin, sur son balcon. Ces sujets de cadre de vie et du végétal doivent aussi rentrer dans les débats et les échanges citoyens. Il faut bien y réfléchir et se projeter dans l’avenir, car les jardins sont évolutifs et doivent être des lieux de rencontres, de loisirs ou encore d’échanges et de partages. Et puis, être à la campagne, comme à Grand-Champ, ne doit pas exclure de penser la nature en ville. Elle doit la pénétrer, proposer des corridors de continuité végétale pour la faune sauvage, des liaisons douces et accessibles pour tous, des aménagements pour plus de confort pour les usagers…
SB : A travers ta mission pour le label « villes et villages fleuris », qu’as-tu découvert d’intéressant ou d’original dans les communes et les villes que tu évalues ?
PL : Certaines communes choisissent véritablement d’animer sur plusieurs années leurs espaces verts à travers des thèmes proposés par les habitants. D’autres pensent pleinement le végétal dans leur politique environnementale pour gérer l’eau, ombrager les espaces, faire des économies (d’intrants, d’énergies, de ressources…) et favoriser la biodiversité. D’autres encore développent des espaces verts pour impliquer leurs habitants comme les jardins partagés, les actions « d’entretien des pieds de murs », de plantations de vergers communaux, mais aussi des projets d’agriculture urbaine.
SB : merci Patrick pour tes éclairages inspirants !
En matière de végétal, les certitudes d’hier ne sont pas celles d’aujourd’hui et encore moins de demain. Il est devenu incontournable d’impliquer les habitants pour déterminer cette politique d’aménagement qui ne consiste plus seulement à entretenir des parterres, mais bien à penser un nouveau cadre de vie pour une meilleure qualité de vie.
Quelle idée voudrais-tu qu’on retienne ?
Planter un arbre, c’est planter de l’eau. C’est une très bonne solution pour participer à l’atténuation du changement climatique et c’est aussi une très belle idée à léguer aux générations futures
Quel conseil peux-tu nous donner pour nos cadres de vie ?
Mettez des couleurs dans vos jardins, sur vos murs et dans les espaces verts : les fleurs sont de véritables cadeaux et rendent les gens heureux
De quoi faut-il se méfier ?
Ne ramenez pas n’importe quelles essences de vos voyages. Restez prudents quand vous faites des échanges de plants : ils peuvent transporter des maladies et être à l’origine de problèmes sanitaires.
Une action citoyenne à mettre en place sur Grand-Champ ?
Les Grégamistes pourraient discuter ensemble sur ce qu’ils attendent des aménagements végétaux pour leur commune, sur les bénéfices attendus de cette nature en ville pour leur cadre de vie. Cela pourrait nourrir les politiques publiques autour de l’environnement, des économies des ressources et de l’identité de leur territoire.











